- CRONSTADT (MARINS DE)
- CRONSTADT (MARINS DE)CRONSTADT MARINS DEAu cours de la révolution de 1905-1907, les marins de la flotte de la mer Noire et de la Baltique jouent un rôle considérable. Ceux de Cronstadt se soulèvent à deux reprises. Le premier soulèvement est consécutif au manifeste du tsar (17 oct. 1905) qui déclenche toute une série de meetings de protestation, notamment le 23. Les équipages revendiquent l’amélioration du service et, sous forme d’ultimatum, un régime démocratique. Le signal du soulèvement est donné le 26 octobre lorsque l’escorte tire sur les manifestants venus libérer les marins arrêtés. Il se poursuit jusqu’au 28 au matin où les troupes, venues d’Oranienbaum et de Peterhof, se rendent maîtresses de la situation. La répression fait rage jusqu’au 1er novembre. De nombreux marins et soldats passent en jugement et la plupart d’entre eux doivent de n’être pas fusillés au mouvement de solidarité qui se propage à Saint-Pétersbourg. Le 18 juillet 1906, c’est la nouvelle du soulèvement de Sveaborg qui accélère la décision d’un soulèvement à Cronstadt. Une réunion pluripartite au matin du 19 en fixe le début à 23 heures. Elle prévoit la prise d’objectifs civils et militaires, notamment les forts. Les officiers de la première et de la deuxième division de marine sont arrêtés. Le fort Constantin est pris. Mais dans la précipitation, l’information circule mal, les insurgés se heurtent au régiment Ienisseï qui ne sait même pas qui sont ses adversaires. Le soulèvement est stoppé dans la nuit avec l’arrivée de troupes de renfort. L’état de siège est décrété, la répression se fait plus farouche encore qu’en octobre 1905.Pendant toute l’année 1917, Cronstadt joue un rôle de premier plan dans la révolution. En avril-mai se produit l’«incident de Cronstadt», le soviet ayant récusé l’autorité du gouvernement provisoire. Il s’achève sur une négociation donnant au soviet le droit de désigner, en son sein, le commissaire du gouvernement. L’agitation reprend à la fin du mois de juin, avec l’arrestation à Petrograd de soixante anarchistes, parmi lesquels des marins de Cronstadt. Après une lutte d’influence serrée entre socialistes révolutionnaires, anarchistes et bolcheviks, il est décidé un appel à la marche sur Petrograd. Un cortège de dix mille hommes environ, en partie armés, composé de marins, de soldats et d’ouvriers se rend le 4 juillet à Petrograd et manifeste à travers toute la ville, aux cris de «tout le pouvoir aux soviets». C’est la première des «journées de juillet», à l’issue desquelles le gouvernement provisoire tentera à plusieurs reprises de désarmer Cronstadt. Dès le début du putsch de Kornilov, le 27 août, les marins de Cronstadt se préparent et participent (un détachement de 3 000 hommes environ) à la défense de Petrograd, tandis qu’ils organisent celle de Cronstadt même, contribuant ainsi à faire échouer la tentative de putsch. Dans le plan de l’insurrection d’octobre, les marins de Cronstadt et la flotte de la Baltique se voient assigner un rôle primordial. La commission technico-militaire de Cronstadt est mise sur pied dès le 10 octobre. Le 24 octobre, les marins de Cronstadt arrivent à Petrograd pour participer à l’insurrection; le 25 au matin, six navires viennent en renfort, portant à cinq mille le nombre des Cronstadtiens qui participent à la prise de Petrograd. C’est d’ailleurs à un détachement de marins de Cronstadt qu’est confiée la garde du palais d’Hiver aussitôt après qu’il a été pris.La révolte des marins de Cronstadt en février-mars 1921 est l’une des manifestations les plus marquantes de l’irritation qu’entraînait le monopole du pouvoir exercé par le Parti communiste russe. À la fin de la guerre civile, les réquisitions forcées provoquent le mécontentement dans les campagnes et la famine fait à nouveau son apparition. Dans les villes, l’approvisionnement et la situation de l’industrie sont précaires. À la fin de février 1921, la grève éclate à Petrograd. Elle est rapidement jugulée grâce à des concessions sur les fournitures de vivres. C’est néanmoins l’étincelle qui déclenche, six jours avant l’ouverture du Xe congrès du Parti communiste réuni à Petrograd, la révolte des marins de Cronstadt. Le 28 février, l’équipage du cuirassé Petropavlovsk adopte une résolution revendiquant: la réélection des soviets au suffrage universel et secret; la liberté de parole et de presse pour les ouvriers, les paysans, les partis anarchistes et socialistes de gauche; la liberté de réunion et d’association pour les ouvriers et les paysans, avec possibilité de constituer des syndicats; la libération de tous les prisonniers politiques socialistes; la suppression de tous les départements politiques spéciaux (armée, marine, transports); la disparition de la position privilégiée qu’occupe le Parti communiste; la suppression de tous les détachements armés communistes; le droit pour les paysans de disposer de leurs terres et la possibilité pour de petites manufactures d’exister à condition qu’il ne soit pas fait usage du travail salarié. Le lendemain, un meeting de 12 000 personnes à Cronstadt adopte la résolution du Petropavlovsk . Le 2 mars, est constitué un Comité révolutionnaire provisoire présidé par le marin Petritchenko. La révolte de Cronstadt dure quinze jours pendant lesquels est publié un quotidien, les Izvestia , sans rencontrer de résistance de la part des communistes locaux. Moscou demande la reddition et, devant le refus des marins révoltés, envoie le 7 mars, M. N. Toukhatchevski à la tête d’un détachement de l’Armée rouge pour juguler la révolte. 200 délégués environ du Xe congrès vont à Cronstadt à la fois pour haranguer les soldats de l’Armée rouge récalcitrants et pour annoncer les concessions du congrès aux paysans et la nouvelle politique économique (N.E.P.); sans résultat. Cronstadt est prise d’assaut le 18 mars et la révolte est noyée dans un bain de sang. Celle-ci a servi de prétexte au Xe congrès pour interdire définitivement les autres partis et pour supprimer les fractions au sein du Parti communiste.
Encyclopédie Universelle. 2012.